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e par crainte et moitie par ennui de l'effort qu'elle faisait. Valentin, a qui ce preambule causait une frayeur mortelle, attendait qu'elle continuat, lorsqu'une idee subite lui traversa l'esprit. Il ne reflechit pas a ce qu'il faisait, et, cedant a un premier mouvement, il s'ecria: --Votre mere l'a vu? --Non, repondit la veuve avec dignite; non, monsieur, ma mere n'a rien vu. Comme elle achevait ces mots, la contredanse commenca, son danseur vint la chercher et elle disparut dans la foule. Valentin attendit impatiemment, comme vous pouvez croire, que la contredanse fut finie. Ce moment desire arriva enfin; mais madame Delaunay retourna a sa place, et, quoi qu'il fit pour l'approcher, il ne put lui parler. Elle ne semblait pas hesiter sur ce qui lui restait a dire, mais penser comment elle le dirait. Valentin se faisait mille questions qui toutes aboutissaient au meme resultat: Elle veut me prier de ne plus revenir chez elle. Une pareille defense, cependant, sur un aussi leger pretexte, le revoltait. Il y trouvait plus que du ridicule; il y voyait ou une severite deplacee, ou une fausse vertu prompte a se faire valoir.--C'est une begueule ou une coquette, se dit-il. Voila, madame, comme on juge a vingt-cinq ans. Madame Delaunay comprenait parfaitement ce qui se passait dans la tete du jeune homme. Elle l'avait bien un peu prevu; mais, en le voyant, elle perdait courage. Son intention n'etait pas tout a fait de defendre sa porte a Valentin; mais, tout en n'ayant guere d'esprit, elle avait beaucoup de coeur, et elle avait vu clairement, le matin, qu'il ne s'agissait pas d'une plaisanterie, et qu'elle allait etre attaquee. Les femmes ont un certain tact qui les avertit de l'approche du combat. La plupart d'entre elles s'y exposent ou parce qu'elles se sentent sur leurs gardes, ou parce qu'elles prennent plaisir au danger. Les escarmouches amoureuses sont le passe-temps des belles oisives. Elles savent se defendre, et ont, quand elles veulent, l'occasion de se distraire. Mais madame Delaunay etait trop occupee, trop sedentaire, elle voyait trop peu de monde, elle travaillait trop aux ouvrages d'aiguille, qui laissent rever et font quelquefois rever; elle etait trop pauvre, en un mot, pour se laisser baiser la main. Non pas qu'aujourd'hui elle se crut en peril; mais qu'allait-il arriver demain, si Valentin lui parlait d'amour, et si, apres-demain, elle lui fermait sa maison, et si, le jour suivant, elle s'en repent
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