ze jours de cela, lorsque Valentin, en
sortant de chez madame Delaunay, oublia son mouchoir sur un fauteuil.
Quand le jeune homme fut parti, madame Delaunay ramassa le mouchoir, et
ayant, par hasard, regarde la marque, elle trouva un I et un P tres
delicatement brodes. Ce n'etait pas le chiffre de Valentin; a qui
appartenait ce mouchoir? Le nom d'Isabelle de Parnes n'avait jamais ete
prononce rue du Plat-d'Etain, et la veuve, par consequent, se perdait
en vaines conjectures. Elle retournait le mouchoir dans tous les sens,
regardait un coin, puis un autre, comme si elle eut espere decouvrir
quelque part le veritable nom du proprietaire.
Et pourquoi, me demanderez-vous, tant de curiosite pour une chose si
simple? On emprunte tous les jours un mouchoir a un ami, et on le perd;
cela va sans dire. Qu'y a-t-il la d'extraordinaire? Cependant madame
Delaunay examinait de pres la fine batiste, et lui trouvait un air feminin
qui lui faisait hocher la tete. Elle se connaissait en broderie, et le
dessin lui paraissait bien riche pour sortir de l'armoire d'un garcon.
Un indice imprevu lui decouvrit la verite. Aux plis du mouchoir, elle
reconnut qu'un des coins avait ete noue pour servir de bourse, et cette
maniere de serrer son argent n'appartient, vous le savez, qu'aux femmes.
Elle palit a cette decouverte, et, apres avoir pendant quelque temps fixe
sur le mouchoir des regards pensifs, elle fut obligee de s'en servir pour
essuyer une larme qui coulait sur sa joue.
Une larme! direz-vous, deja une larme! Helas! oui, madame, elle
pleurait. Qu'etait-il donc arrive? Je vais vous le dire; mais il faut
pour cela revenir un instant sur nos pas.
Il faut savoir que, le surlendemain du bal, Valentin etait venu chez
madame Delaunay. La mere lui ouvrit la porte, et lui repondit que sa fille
etait sortie. Madame Delaunay, la-dessus, avait ecrit une longue lettre au
jeune homme; elle lui rappelait leur dernier entretien, et le suppliait de
ne plus venir la voir. Elle comptait sur sa parole, sur son honneur et sur
son amitie. Elle ne se montrait pas offensee, et ne parlait pas du galop.
Bref, Valentin lut cette lettre d'un bout a l'autre sans y trouver rien de
trop ni de trop peu. II se sentit touche, et il eut obei si le dernier mot
n'y eut pas ete. Ce dernier mot, il est vrai, avait ete efface, mais si
legerement, qu'on ne l'en voyait que mieux. "Adieu, disait la veuve en
terminant sa lettre; soyez heureux."
Dire a un amant qu'on bannit:
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