trairai pas longtemps! tu ne me reverras plus jamais!
A peine avait-elle prononce ces mots, qu'elle se precipita dans le
fleuve.
--Au secours! au secours! elle se noie, s'ecrierent plusieurs voix
confuses.
On courut ca et la, le tumulte etait au comble. L'officier ne pouvait
quitter le gouvernail sans exposer la vie de tous ceux qui se
trouvaient sur le yacht, et s'il continuait a le diriger, la jeune
fille etait perdue; car, au lieu de la secourir, on se bornait
a crier. Ces cris venaient de reveiller le patron; il saisit le
gouvernail que le jeune homme lui abandonna pour se depouiller de ses
vetements, et se precipiter dans le fleuve afin de sauver sa belle
ennemie.
Dans les moments critiques, le changement de la main qui gouverne
amene toujours une catastrophe funeste, et le bateau, malgre
l'experience et l'habilete du patron, echoua sur le sable.
Pour le nageur habile, l'eau est un element ami; elle porta docilement
l'officier qui rejoignit bientot la jeune fille; il la saisit et
la soutint avec tant de force, qu'elle semblait nager a ses cotes:
c'etait l'unique secours qu'il put lui donner pour l'instant, car le
courant etait si fort, que toute tentative pour gagner le rivage les
eut rendus la proie des flots. Au bout de quelques instants il avait
laisse derriere lui le yacht echoue, le detroit et les iles; le fleuve
etait redevenu calme, car il coulait de nouveau dans un vaste lit; le
danger le plus grand etait passe, et le jeune homme, qui n'avait agi
jusque la qu'instinctivement, retrouva enfin la force de calculer ses
actions. Ses yeux chercherent et decouvrirent bientot le point du
rivage le moins eloigne. Redoublant d'efforts il se dirigea vers ce
point qui etait garni d'arbres et qui s'avancait dans le fleuve.
Il l'atteignit facilement et y deposa la jeune fille. Ce fut alors
seulement qu'il s'apercut qu'elle ne donnait aucun signe de vie.
Regardant autour de lui avec desespoir, comme s'il demandait des
secours au hasard, il vit un sentier battu qui conduisait a travers le
bois. L'espoir de trouver un lieu habite ranima son courage.
Charge du doux fardeau qu'il cherchait a disputer a la mort, il
s'avanca a grands pas sur ce sentier qui ne tarda pas a le conduire a
la demeure solitaire d'un jeune couple nouvellement marie. Sa position
n'avait pas besoin de commentaires, et le mari et la femme firent tout
ce qui etait en leur pouvoir pour l'aider a secourir sa compagne; l'un
alluma du feu, l'aut
|