nt, cette impressionnable jeune
fille etait revenue pres d'Ottilie, qu'elle paraissait aimer plus
passionnement que jamais. Cherchant a la distraire par son babil et
l'entourant des soins les plus tendres, elle ne respirait plus que
pour sa chere maitresse. En apprenant qu'on lui permettait de la
suivre et de rester pres d'elle, et qu'elle verrait des contrees
inconnues, car elle n'etait jamais sortie de son village, elle ne
se connaissait plus de joie, et courait a chaque instant chez ses
parents, chez ses amis et ses connaissances pour prendre conge d'eux
et leur faire part de son bonheur. Malheureusement elle entra dans
une chambre ou il y avait des enfants malades de la rougeole, et elle
ressentit aussitot l'effet de la contagion.
Charlotte ne voulait pas retarder le depart de sa niece qui,
elle-meme, ne le desirait point. Au reste, elle connaissait la route
et les maitres de l'auberge ou elle devait passer la premiere nuit.
Le cocher du chateau a qui l'on avait confie la tache de la conduire
etait un homme sur, il n'y avait donc rien a craindre.
Depuis longtemps Charlotte desirait quitter la maison d'ete et
s'arracher ainsi aux images qu'elle lui retracait; mais, avant de
retourner au chateau, elle voulait faire remettre les appartements
qu'Ottilie y avait habitee, dans l'etat ou ils etaient lorsqu'Edouard
les occupait avant l'arrivee du Major.
L'espoir de ressaisir un bonheur perdu vient souvent nous surprendre
malgre nous, et Charlotte pouvait se croire de nouveau autorisee a
nourrir cet espoir.
CHAPITRE XVI.
Lorsque Mittler arriva pres du Baron pour lui faire part du depart
d'Ottilie, il le trouva seul, et la tete appuyee dans sa main droite.
Il paraissait souffrir.
--Est-ce que votre mal de tete vous tourmente encore? lui dit-il.
--Oui, et j'aime cette souffrance, car elle me rappelle Ottilie.
Peut-etre est-elle en ce moment appuyee sur sa main gauche; car, vous
le savez, pour elle, le mal est au cote gauche de la tete. Il est sans
doute plus fort que le mien, pourquoi ne le supporterais-je pas avec
autant de patience qu'elle? Au reste, cette souffrance a pour moi
quelque chose d'utile, de salutaire; elle me rappelle puissamment la
patience angelique qui complete toutes les perfections dont elle est
douee. Ce n'est que lorsque nous souffrons que nous comprenons combien
il faut de grandes et hautes qualites pour supporter la douleur.
Enhardi par l'air de resignation de son jeune ami, Mi
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