e du bataillon defila
comme pour se retirer. Menou, de son cote, sortit avec sa troupe, et fit
rebrousser chemin a ses colonnes qui eurent peine a traverser la foule
amassee dans les quartiers environnans. Tandis qu'il avait la faiblesse
de ceder devant la fermete de la section Lepelletier, celle-ci etait
rentree dans le lieu de ses seances, et, fiere d'avoir resiste,
s'enhardissait davantage dans sa rebellion. Le bruit se repandit
sur-le-champ que les decrets n'etaient pas executes, que l'insurrection
restait victorieuse; que les troupes revenaient sans avoir fait
triompher l'autorite de la convention. Une foule de temoins de cette
scene coururent aux tribunes de l'assemblee, qui etait en permanence,
avertirent les deputes, et on entendit crier de tous cotes: _Nous sommes
trahis! nous sommes trahis! a la barre le general Menou!_ On somma les
comites de venir donner des explications.
Dans ce moment, les comites, avertis de ce qui venait de se passer,
etaient dans la plus grande agitation. On voulait arreter Menou, et le
juger sur-le-champ. Cependant cela ne remediait a rien; il fallait
suppleer a ce qu'il n'avait pas fait. Mais quarante membres, discutant
des mesures d'execution, etaient peu propres a s'entendre et a agir avec
la vigueur et la precision necessaires. Trois representans, charges de
diriger la force armee, n'etaient pas non plus une autorite assez
energique. On songea a nommer un chef comme dans toutes les occasions
decisives; et dans cet instant, qui rappelait tous les dangers de
thermidor, on songea au depute Barras, qui, en sa qualite de general de
brigade, avait recu le commandement dans cette journee fameuse, et s'en
etait acquitte avec toute l'energie desirable. Le depute Barras avait
une grande taille, une voix forte; il ne pouvait pas faire de longs
discours, mais il excellait a improviser quelques phrases energiques et
vehementes, qui donnaient de lui l'idee d'un homme resolu et devoue. On
le nomma general de l'armee de l'interieur, et on lui donna comme
adjoints les trois representans charges avant lui de diriger la force
armee. Une circonstance rendait ce choix fort heureux. Barras avait
aupres de lui un officier tres capable de commander, et il n'aurait pas
eu la petitesse d'esprit de vouloir ecarter un homme plus habile que
lui. Tous les deputes, envoyes en mission a l'armee d'Italie,
connaissaient le jeune officier d'artillerie qui avait decide la prise
de Toulon, et fait tomber Saorgio et l
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