ni le 5 brumaire. A Paris, les agens royalistes firent nommer le
conventionnel Saladin, qu'ils avaient deja gagne. Dans quelques
departemens, ils provoquerent des rixes; on vit des assemblees
electorales faire scission, et se partager en deux.
Ces menees, ce retour de hardiesse contribuerent a irriter beaucoup les
patriotes qui avaient vu, dans la journee du 13, se realiser tous leurs
pronostics; ils etaient fiers a la fois d'avoir devine juste, et d'avoir
vaincu par leur courage le danger qu'ils avaient si bien prevu. Ils
voulaient que la victoire ne fut pas inutile pour eux, qu'elle amenat
des severites contre leurs adversaires, et des reparations pour leurs
amis detenus dans les prisons; ils firent des petitions, dans lesquelles
ils demandaient l'elargissement des detenus, la destitution des
officiers nommes par Aubry, le retablissement dans leurs grades de ceux
qui avaient ete destitues, le jugement des deputes enfermes, et leur
reintegration sur les listes electorales, s'ils etaient innocens. La
Montagne, appuyee par les tribunes toutes remplies de patriotes,
applaudissait a ces demandes, et reclamait avec energie leur adoption.
Tallien, qui s'etait rapproche d'elle, et qui etait le chef civil du
parti dominant, comme Barras en etait le chef militaire, Tallien tachait
de la contenir; il fit ecarter la derniere demande relative a la
reintegration sur les listes des deputes detenus, comme contraire aux
decrets des 5 et 13 fructidor. Ces decrets, en effet, declaraient
ineligibles les deputes actuellement suspendus de leurs fonctions.
Cependant la Montagne n'etait pas plus facile a contenir que les
sectionnaires; et les derniers jours de cette assemblee, qui n'avait
plus qu'une decade a sieger, semblaient ne pouvoir pas se passer sans
orage.
Les nouvelles des frontieres contribuaient aussi a augmenter
l'agitation, en excitant les defiances des patriotes et les esperances
inextinguibles des royalistes. On a vu que Jourdan avait passe le Rhin a
Dusseldorf, et s'etait avance sur la Sieg; que Pichegru etait entre dans
Manheim, et avait jete une division au-dela du Rhin. Des evenemens aussi
heureux n'avaient inspire aucune grande pensee a ce Pichegru tant vante,
et il avait prouve ici ou sa perfidie ou son incapacite. D'apres les
analogies ordinaires, c'est a son incapacite qu'il faudrait attribuer
ses fautes; car, meme avec le desir de trahir, on ne refuse jamais
l'occasion de grandes victoires; elles servent toujours a
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