eurs des preuves de
cette plus grande fertilite des colonies dans la culture des plantes
qui sont communes a l'Europe et au nouveau continent[14].
Le travail des esclaves est moins cher, dit-on, que celui du
journalier, et c'est bien moins le produit absolu de la culture qu'il
importe au proprietaire d'augmenter, que le benefice qu'il en retire.
Si l'on calcule l'interet de la valeur d'un esclave, le prix des
remplacements necessaires, et les frais de nourriture et d'hopital, on
verra que ce meilleur marche n'est qu'une illusion, et que chaque
Negre travaillant coute annuellement plus de 500 livres a son
maitre[15].
On peut objecter enfin que la chaleur du climat des colonies ne
permettroit pas a nos cultivateurs d'y fournir la meme mesure de
travail. De nombreuses experiences dementiroient cette assertion;
elles prouvent que le travail est un moyen de conservation dans nos
iles, pour les ouvriers que la fortune y appelle. La chaleur dans nos
provinces Meridionales, aux mois de Juin, de Juillet et d'Aout, est
souvent plus forte qu'a St. Domingue; et c'est l'epoque ou les travaux
de nos campagnes sont les plus forces. D'ailleurs je ne propose pas de
conduire des cultivateurs d'Europe dans nos etablissements. Je deplore
les funestes essais qu'on a faits a cet egard, et je sais combien
l'ambition cruelle de ceux qui les dirigeoient a fait perir de
victimes. Nous avons a nos portes assez de terres incultes et de
champs deserts. Ce sont nos esclaves qu'il faut attacher au sol de nos
colonies. Il faut les former au travail, et les aider de toutes les
ressources de l'art pour faciliter leur culture, et rendre leurs
travaux plus productifs. L'emploi des machines en agriculture peut
etre regarde comme ayant double la force des cultivateurs et le
produit de leur travail. Voila quel seroit encore l'effet de la
liberte dans les colonies. Je suis etonne moi-meme des resultats
auxquels ces verites conduisent. L'egarement de l'interet particulier
est donc toujours une suite de l'oubli des principes de l'ordre et de
la justice.
Apres avoir rappelle ces principes sacres, apres avoir montre les
considerations politiques et les avantages publics et particuliers qui
sollicitent en faveur de la liberte de nos esclaves, je dois indiquer
les moyens de donner cette liberte sans allarmer l'interet
particulier, et en evitant les dangers d'une revolution trop rapide.
Lorsqu'il faut detruire de grands desordres publics, on doit se tenir
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