s l'aimer, je le
dois, je le dis a tous ceux que j'estime. Faites cette conversion plus
etendue, dans les limites ou vous avez opere la mienne, cela vous est
facile. Aucune ame de quelque prix ne transformera son ideal d'egalite
en une religion de pouvoir absolu.
Mais tout homme de coeur, pour qui vous aurez ete juste ou clement
en depit de la raison d'Etat, s'abstiendra de hair votre nom et de
calomnier vos sentiments. C'est de quoi je peux repondre a l'egard de
ceux sur qui j'ai quelque influence. Eh bien, au nom de votre propre
popularite, je vous implore encore pour l'amnistie; ne croyez pas ceux
qui ont interet a calomnier l'humanite, elle est corrompue, mais elle
n'est pas endurcie. Si votre clemence fait quelques ingrats, elle vous
fera mille fois plus de partisans sinceres. Si elle est blamee par des
coeurs sans pitie, elle sera aimee et comprise par tout ce qui est
honnete dans tous les partis.
Et, aujourd'hui, accordez-moi, prince, ce que deux fois vous m'avez fait
serieusement esperer. Ordonnez l'elargissement de tous mes compatriotes
de l'Indre. Parmi ceux-la, j'ai plusieurs amis, mais que justice soit
faite a tous; puisque personne ne s'est declare contre vous, ce n'est
que justice. Qu'on sache que ce que vous m'avez dit est vrai: "Je ne
persecute pas la croyance, je ne chatie pas la pensee."
Que cette parole, remportee dans mon coeur de l'Elysee et qui m'a
presque guerie, reste en moi comme une consolation au milieu de mon
effroi politique. Que les partis qui vous trahissent en feignant de vous
servir ne nous disent plus: "Ce n'est pas notre faute, le pouvoir est
implacable." Que les intrigants qui se pressent dans l'ombre de votre
drapeau ne nous fassent pas entendre qu'ils attendent des princes plus
genereux qui acheteront les coeurs par l'amnistie. Prenez cette couronne
de la clemence; celle-la, on ne la perd jamais.
Ah! cher prince, on vous calomnie affreusement a toute heure, et ce
n'est pas nous qui faisons cela. Pardon, pardon, de mon insistance!
qu'elle ne vous lasse pas; ce n'est plus un cri de detresse seulement,
c'est un cri d'affection, vous l'avez voulu. Mais, en attendant cette
amnistie que vos veritables amis nous promettent, faites que votre
generosite soit connue dans nos provinces; connaissez ce que dit le
peuple qui vous a proclame: "Il voudrait etre bon, mais il a de cruels
serviteurs et il n'est pas le maitre. Notre volonte est meconnue en lui,
nous avons voulu qu'il fut tout-p
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