Lorsqu'il se fut
eloigne de la portiere, Sarah dit ingenument a lady Mowbray: "Ah! mon
Dieu! chere tante, je ne savais pas que vous aviez un fils; on m'avait
toujours dit que vous n'aviez pas d'enfants?
--C'est mon fils adoptif, Sarah, repondit lady Mowbray; regardez-le
comme votre frere."
Sarah n'en demanda pas davantage, et ne s'etonna meme pas; elle regarda
de cote Olivier, lui trouva l'air noble et doux; mais, reservee comme
une veritable Anglaise, elle ne le regarda plus, et, durant huit jours,
ne lui parla plus que par monosyllabes et en rougissant.
Ce que lady Mowbray voulait eviter par-dessus tout, c'etait de laisser
voir ses craintes a Olivier; elle en rougissait a ses propres yeux et ne
concevait pas la jalousie qui se manifeste. Elle etait Anglaise
aussi, et fiere au point de mourir de douleur plutot que d'avouer une
faiblesse. Elle affecta, au contraire, d'encourager l'amitie d'Olivier
pour Sarah; mais Olivier s'en tint avec la jeune miss a une prevenance
respectueuse, et la timide Sarah eut pu vivre dix ans pres de lui sans
faire un pas de plus.
Lady Mowbray se rassura donc, et commenca a gouter un bonheur plus
parfait encore que celui dont elle avait joui jusqu'alors. La fidelite
d'Olivier paraissait inebranlable; il semblait ne pas voir Sarah
lorsqu'il etait aupres de Metella, et s'il la rencontrait seule dans la
maison, il l'evitait sans affectation.
Une annee s'ecoula pendant laquelle Sarah, fortifiee par l'exercice
et l'air des montagnes, devint tellement belle que les jeunes gens de
Geneve ne cessaient d'errer autour du parc de lady Mowbray pour tacher
d'apercevoir sa niece.
Un jour que lady Mowbray et sa niece assistaient a une fete villageoise
aux environs de la ville, un de ces jeunes gens s'approcha tres-pres de
Sarah et la regarda presque insolemment. La jeune fille effrayee saisit
vivement le bras d'Olivier et le pressa sans savoir ce qu'elle faisait.
Olivier se retourna, et comprit en un instant le motif de sa frayeur. Il
echangea d'abord des regards menacants et bientot des paroles serieuses
avec le jeune homme. Le lendemain, Olivier quitta le chateau de bonne
heure et revint a l'heure du dejeuner; mais, malgre son air calme, lady
Mowbray s'apercut bientot qu'il souffrait, et le forca de s'expliquer.
Il avoua qu'il venait de se battre avec l'homme qui avait regarde
insolemment miss Mowbray, et qu'il l'avait grievement blesse; mais il
l'etait lui-meme, et Metella l'ayant force de r
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