ly, quand
nous entendimes une clameur derriere nous, c'est-a-dire vers la rue du
Faubourg-Saint-Antoine; en nous retournant, nous apercumes des hommes
qui couraient.
--Je ne suis pas aussi assure que toi, qu'il ne se passera rien de grave
aujourd'hui, me dit M. de Planfoy; il y a eu toute la nuit des allees
et venues dans le faubourg, et bien certainement on a du essayer
d'organiser une resistance; les revolutions populaires ne s'improvisent
pas, il leur faut plusieurs jours, trois jours generalement, pour mettre
leurs combattants sur pied. Nous ne sommes qu'au deuxieme jour.
Pendant qu'il me parlait ainsi, nous etions revenus en arriere: nous
eumes alors l'explication du tumulte que nous avions entendu.
Une barricade etait commencee au coin des rues Cotte et
Sainte-Marguerite, et des representants ceints de leur echarpe
parcouraient la rue du Faubourg-Saint-Antoine en criant: "Aux armes!
vive la Republique!"
Cette barricade n'avait aucune solidite; elle etait formee d'un omnibus
renverse et de deux charrettes, et c'etait a peine si elle obstruait le
milieu de la chaussee, assez large en cet endroit.
Les defenseurs qui devaient combattre derriere ce mauvais abri n'etaient
pas non plus bien redoutables: c'etait a peine s'ils atteignaient le
nombre d'une centaine, et encore, dans cette centaine, en voyait-on
plusieurs qui ne paraissaient guere resolus, allant de ca de la,
causant, s'arretant, regardant au loin, tantot du cote de la Bastille,
tantot du cote de la barriere du Trone, comme s'ils avaient d'autres
preoccupations que de se battre.
Au coin de chaque rue, des rassemblements assez compactes commencaient a
se masser; mais ils etaient composes de curieux et d'indifferents.
Je n'avais jamais vu de revolution; en 1830, j'etais enfant, et, en
1848, j'etais en Afrique; je fus surpris de ce calme apathique, et il me
sembla que les representants et ceux qui les accompagnaient en criant:
"Aux armes!" s'adressaient a des sourds; ils criaient dans le vide,
leurs voix n'eveillaient aucun echo.
Parmi ces representants se trouvait celui que nous avions vu la veille
sur la place de la Bastille et qui avait voulu entrainer le peuple.
M. de Planfoy l'aborda.
--Eh bien, dit-il, vous organisez la resistance?
--Nous la tentons.
--Serez-vous soutenus?
--Vous voyez l'inertie du peuple. Nous esperons le galvaniser, car nous
ne comptons plus que sur lui.
--Il parait bien froid.
--Il est trompe. Depuis q
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