lasses
de vivre, et plus inquiets de leur salut que de la faveur du roi. Le
peuple, appauvri par le faste de son maitre et par la famine, a deja
fait entendre au loin les premiers murmures:
"Mme de Maintenon alla a Meudon, et vit Monseigneur dans sa petite
galerie du chateau neuf; messeigneurs les ducs de Bourgogne et de
Berri y etaient. Monseigneur lui fit beaucoup d'honnetetes, malgre
l'incognito. Elle etait partie de Vincennes a midi; et le peuple, dans
le faubourg Saint-Antoine, voyant passer deux carrosses a six chevaux,
commencait a dire des insolences, et elle fut fort aise de trouver les
mousquetaires qui la firent passer."
Ces plaintes des faubourgs iront grandissant toujours. Mais aussi, que
d'aventures etranges dans cette noblesse impatiente de l'autorite du
maitre! Un duc de Mortemart perd aux des son regiment, contre le prince
d'Isenghein. On introduit a Versailles meme un charlatan qui fait de
l'or. La guerre est partout avec sa defaite, et Dangeau lui-meme ecrit
ceci, parlant de son dieu sur la terre: "Le roi est accable de lassitude
et de chagrins." Deja se manifeste, au milieu des vices inconnus a cette
cour, le jeune duc de Fronsac, qui sera plus tard le marechal duc de
Richelieu. Ainsi, le passe s'efface; ainsi, chaque instant emporte un
debris du regne. En moins d'un an, trois dauphins, le grand-pere,
le pere et le fils avec la dauphine. Il y avait encore, oubliees et
vivantes, reines des belles annees et des beaux jours, Mlle de La
Valliere et Mme de Montespan... les voila mortes. Mais il est reserve a
ce grand ecrivain nomme Saint-Simon de nous montrer ces deux images:
"Mme de La Valliere mourut en ce temps-ci (1710) aux carmelites de la
rue Saint-Jacques, ou elle avait fait profession, le 3 juin 1675, sous
le nom de soeur Marie de la Misericorde, a trente et un ans. La fortune
et la honte, la modestie, la bonte dont elle usa, la bonne foi de son
coeur sans aucun autre melange, tout ce qu'elle employa pour empecher le
roi d'eterniser la memoire de sa faiblesse et de son peche, ce qu'elle
souffrit du roi et de Mme de Montespan, ses deux fuites de la cour, la
premiere aux benedictines de Saint-Cloud, ou le roi alla en personne
se la faire rendre, pret a commander de bruler le couvent; l'autre aux
filles de Sainte-Marie de Chaillot, ou le roi envoya M. de Lauzun, son
capitaine des gardes, avec main-forte pour enfoncer le couvent, qui la
ramena; cet adieu public si touchant a la reine qu'elle ava
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