loge au musee."
Il eut a peine la force de se trainer vers la crete du toit et de s'y
poser, tant il etait brise de fatigue et de decouragement. Il se
ressaisit pourtant et rassembla ses esprits.
"Un autre geai passa; l'entendant invoquer le ciel, il s'enquit du
malheur qui lui arrivait. Notre ami lui donna tous les details de son
aventure. "Voici le trou, lui dit-il, et si vous ne me croyez pas,
descendez vous convaincre vous-meme." Le camarade revint au bout d'un
instant: "Combien avez-vous enfoui de glands la-dedans?"
demanda-t-il.--"Pas moins de deux tonneaux."
"Le nouveau venu retourna voir, mais, n'y comprenant rien, il poussa un
cri d'appel qui attira trois autres geais. Tous, reunis, procederent a
l'examen du trou, et se firent raconter de nouveau les details de
l'histoire; apres une discussion generale leurs opinions furent aussi
divergentes que celles d'un comite de notables humains reunis pour
trancher d'une question grave. Ils appelerent d'autres geais; ces
volatiles accoururent en foule si compacte que leur nombre finit par
obscurcir le ciel. Il y en avait bien cinq mille; jamais de votre vie
vous n'avez entendu des cris, des querelles et un carnage semblables.
Chacun des geais alla regarder le trou; en revenant, il s'empressait
d'emettre un avis different de son predecesseur. C'etait a qui
fournirait l'explication la plus abracadabrante. Ils examinerent la
maison par tous les bouts. Et comme la porte etait entr'ouverte, un geai
eut enfin l'idee d'y penetrer. Le mystere fut bien entendu eclairci en
un instant: il trouva tous les glands par terre. Notre heros battit des
ailes et appela ses camarades: "Arrivez! arrivez! criait-il; ma parole!
cet imbecile n'a-t-il pas eu la pretention de remplir toute la maison
avec des glands?" Ils vinrent tous en masse, formant un nuage bleu; en
decouvrant la clef de l'enigme ils s'esclafferent de la betise de leur
camarade.
"Eh bien! monsieur, apres cette aventure, tous les geais resterent la
une grande heure a bavarder comme des etres humains. Ne me soutenez donc
plus qu'un geai n'a pas l'esprit grivois; je sais trop le contraire. Et
quelle memoire aussi! Pendant trois annees consecutives, je vis
revenir, chaque ete, une foule de geais des quatre coins des Etats-Unis:
tous admirerent le trou, d'autres oiseaux se joignirent a ces pelerins,
et tous se rendirent compte de la plaisanterie, a l'exception d'une
vieille chouette originaire de Nova-Scotia. Comme elle n'y vo
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