e ballot oblong dont nous avons
deja parle, lequel renfermait sans doute quelque objet de
contrebande, fut transporte a terre avec des precautions infinies.
Aussitot, l'homme qui avait debarque le premier courut
diagonalement vers le village de Scheveningen, se dirigeant vers
la pointe la plus avancee du bois. La il chercha cette maison
qu'une fois deja nous avons entrevue a travers les arbres, et que
nous avons designee comme la demeure provisoire, demeure bien
modeste, de celui qu'on appelait par courtoisie le roi
d'Angleterre.
Tout dormait la comme partout; seulement, un gros chien, de la
race de ceux que les pecheurs de Scheveningen attellent a de
petites charrettes pour porter leur poisson a La Haye, se mit a
pousser des aboiements formidables aussitot que l'etranger fit
entendre son pas devant les fenetres. Mais cette surveillance, au
lieu d'effrayer le nouveau debarque, sembla au contraire lui
causer une grande joie, car sa voix peut-etre eut ete insuffisante
pour reveiller les gens de la maison, tandis qu'avec un auxiliaire
de cette importance, sa voix etait devenue presque inutile.
L'etranger attendit donc que les aboiements sonores et reiteres
eussent, selon toute probabilite, produit leur effet, et alors il
hasarda un appel. A sa voix le dogue se mit a rugir avec une telle
violence, que bientot a l'interieur une autre voix se fit
entendre, apaisant celle du chien. Puis, lorsque le chien se fut
apaise:
-- Que voulez-vous? demanda cette voix a la fois faible, cassee et
polie.
-- Je demande Sa Majeste le roi Charles II, fit l'etranger.
-- Que lui voulez-vous?
-- Je veux lui parler.
-- Qui etes-vous?
-- Ah! mordioux! vous m'en demandez trop, je n'aime pas a
dialoguer a travers les portes.
-- Dites seulement votre nom.
-- Je n'aime pas davantage a decliner mon nom en plein air;
d'ailleurs, soyez tranquille, je ne mangerai pas votre chien, et
je prie Dieu qu'il soit aussi reserve a mon egard.
-- Vous apportez des nouvelles peut-etre, n'est-ce pas, monsieur?
reprit la voix, patiente et questionneuse comme celle d'un
vieillard.
-- Je vous en reponds, que j'en apporte des nouvelles, et
auxquelles on ne s'attend pas, encore! Ouvrez donc, s'il vous
plait, hein?
-- Monsieur, poursuivit le vieillard, sur votre ame et conscience,
croyez-vous que vos nouvelles vaillent la peine de reveiller le
roi?
-- Pour l'amour de Dieu! mon cher monsieur, tirez vos verrous,
vous ne serez pas fache, je
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