rgner les tourments que j'endure! O Andre!
quatre jours sans te voir, a present c'est impossible a supporter sans
mourir!"
Andre sentit renaitre son courage. Il viola sans hesitation la consigne
de son pere, et courut a travers champs jusqu'a la ville. Il arriva plus
fatigue par les terres labourees, les haies et les fosses qu'il avait
franchis, qu'il ne l'eut ete par le plus long chemin. Poudreux et
haletant, il se jeta aux pieds de Genevieve et lui demanda pardon en la
serrant contre son coeur.
--Pardonne-moi, pardonne-moi, lui disait-il, oh! pardonne-moi de t'avoir
fait souffrir?
--Je n'ai rien a vous pardonner, Andre, lui repondit-elle; quels torts
pourriez-vous avoir envers moi? Je ne vous accuse pas, je ne vous
interroge meme pas. Comment pourrais-je supposer qu'il y a de votre
faute dans ceci? Je vous vois et je remercie Dieu.
XIII.
Cette sainte confiance donna de veritables remords a Andre. Il savait
bien qu'avec un peu plus de courage il aurait pu s'echapper plus tot;
mais il n'osait avouer ni son asservissement ni la tyrannie de son pere.
Declarer a Genevieve les traverses qu'elle avait a essuyer pour devenir
sa femme etait au-dessus de ses forces. Bien des jours se passerent sans
qu'il put se decider a sortir de cette difficulte, soit en affrontant la
colere du marquis, soit en eveillant l'effroi et le chagrin dans l'ame
tranquille de Genevieve. Il erra pendant un mois. On le rencontrait a
toutes heures du jour ou de la nuit courant ou plutot fuyant a travers
pres ou bois, de la ville au chateau et du chateau a la ville; ici
cherchant a apaiser les inquietudes de sa maitresse, la tachant d'eviter
les remontrances paternelles. Au milieu de ces agitations, la force lui
manqua; il ne sentit plus que la fatigue de lutter ainsi contre son
coeur et contre son caractere. La fievre le prit et le plongea dans le
decouragement et l'inertie.
Jusque-la il avait reussi a faire accepter a Genevieve toutes les
mauvaises raisons qu'il avait pu inventer pour excuser l'irregularite
et la brievete de ses visites. Il eprouva une sorte de satisfaction
paresseuse et melancolique a se sentir malade; c'etait une excuse
irrecusable a lui donner de son absence, c'etait une maniere d'echapper
a la surveillance et aux reproches du marquis. Le besoin egoiste
du repos parla plus haut un instant que les empressements et les
impatiences de l'amour. Il ferma les yeux et s'endormit presque joyeux
de n'avoir pas six lieues a
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