ez bonne pour qu'il n'eut pas besoin de gagner
quatre-vingt mille francs? Si oui, comment avait-il accepte d'etre
president d'un cercle, avec un traitement paye par la cagnotte?
D'ailleurs, tous ceux qui parlaient de cette partie ne connaissaient
pas Adeline et n'avaient pas des lors de raisons pour le defendre.
Un president de cercle qui avait triche, c'etait vrai. Une sequence,
c'etait vrai. Il y a tant de joueurs qui ont ete ecorches vifs par ce
genre de vol contre lequel la defense est a peu pres impossible qu'ils
voient des sequences partout et plus souvent encore que dans la realite,
ou cependant elles se rencontrent si frequemment. Et puis ce president
n'etait pas le premier venu; il avait un nom; il etait depute; on lisait
ce nom dans les journaux, et des lors les accusations devenaient plus
vraisemblables; c'etait drole; il y aurait du scandale.
Une rumeur s'etait elevee qui avait instantanement couru le tout-Paris
des cercles et du boulevard:
--Le president du _Grand I_ a passe une sequence a son cercle.
--Est-ce qu'il n'est pas depute?
--Justement.
--Ah! elle est bien bonne!
--Si les presidents s'en melent!
C'etait cette double qualite de depute et de president qui donnait du
piquant a la chose: pas interessantes pour le boulevard, les histoires
de gens que personne ne connait. Il arrive assez souvent qu'il se gagne
des sommes importantes, et d'une facon etonnante sans qu'on s'en occupe
en dehors des cercles ou ces parties ont ete jouees, mais c'est qu'alors
ceux qui ont opere ne comptent pas pour le boulevard, n'existent pas
pour lui, ils ne sont nulle part, comme disent les Anglais; Adeline
etait quelque part, au palais Bourbon, dans les journaux, et des lors
"elle etait bien bonne"; ceux-la memes qui auraient hausse les epaules,
si on leur avait parle d'une sequence passee dans un des cercles les
plus connus de Paris, sous les yeux de cent personnes, par un etranger
du Perou ou des Indes, devenaient attentifs quand on ajoutait que
le coupable etait un depute, un homme en vue, c'etait un evenement
parisien, et tout de suite, sans autre examen, ils se disaient: "C'est
bien possible!" et cette possibilite, ils la faisaient partager aux
autres en leur racontant cette histoire: "Un depute, elle est bien
bonne."
A cote de ceux qui parlaient de cette histoire parce qu'elle etait
drole, il y avait tout une categorie de gens qui s'en occupaient, parce
qu'elle les interessait personnellement--cel
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