cene embarrassants.
Un type bien amusant, c'est le souffleur _gobeur_.
C'est un jeune, celui-la! Il n'est pas encore blase et s'amuse dans son
trou, plus que le titi qui a paye sa place.
Pour lui, la piece est toujours nouvelle; il sait tous les roles par
coeur, y compris ceux des femmes et pourrait, a la rigueur, souffler sans
brochure.
Il faut le voir pendant la piece, soupirer avec l'amoureux, rire avec le
comique, pleurer avec l'ingenue, maudire avec le pere noble; il sanglote
trepigne, chauffe le traitre, encourage la duegne et s'oublie parfois
jusqu'a crier au premier role: "Vas-y!"
Heureux enfant, qui croit que c'est arrive! Laissons-le a ses cheres
illusions! Pleure, exulte, va! ca vaut mieux que de blaguer la
situation!
Combien je prefere ce souffleur convaincu a celui qui la fait _au
blase_!
Voyez-le dans sa niche, renfrogne, regardant dedaigneusement les
artistes et semblant leur dire:
--Etes-vous assez mauvais!
N'encourageant jamais personne, ne disant du bien que des morts et ne
manquant jamais l'occasion de s'ecrier, si l'on vient a lui parler de
Saint-Germain:
--Ah! si vous aviez vu Arnal!
Un souffleur extraordinaire, c'est le pere Ronflard.
Tres curieux. Notre bonhomme dort en soufflant ou souffle en dormant,
comme il vous plaira; pendant l'entr'acte, au lieu d'aller siroter le
mele-cassis chez le concierge du theatre, buvetiere de messieurs de
l'orchestre, machinistes et autres employes, il reste enfoui dans le
fond de sa boite et dort du sommeil du juste, jusqu'au moment precis ou
le rideau se leve; et ce n'est pas la sonnette qui l'a reveille, non
plus que la petite _polka-vinaigre_ jouee par l'orchestre: c'est
l'instinct. Il ouvre l'oeil au moment voulu; son somme est mesure.
Souffler est extremement difficile.
Il faut connaitre les acteurs, pour les bien souffler; avoir etudie leur
caractere, possede leur temperament, en un mot, savoir a quelle
_nature_, on a a faire.
Le veritable souffleur doit voir, lorsque l'artiste entre en scene,
dans quelles dispositions d'esprit il se trouve.
S'il est gai, porte aux cascades, dispose a ajouter au texte, alors, lui
laisser la bride sur le cou.
S'il est au contraire, morose, ennuye, chagrin par suite d'ennuis de
famille ou de discussions avec l'administration, l'encourager, souligner
ses effets, approuver son jeu.
Si l'artiste est traqueur, ne pas le lacher, le tenir serre, afin qu'il
se sente "soutenu."
Une chose t
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