eures? Souffres-tu? Qu'as-tu?
MAURICE
--Je ne souffre que d'une grande faiblesse. Je pleure parce que je vous
aurai quittes depuis longtemps quand le printemps arrivera.
M. DE NANCE
--Pourquoi? Si votre bonheur et votre sante dependent de votre sejour
chez moi, je ne serai pas assez cruel pour vous renvoyer, mon pauvre
garcon.
MAURICE
--Ce n'est pas ce que je veux dire, monsieur... Je crois que je n'ai
plus longtemps a vivre.
FRANCOIS
--Maurice, ne pense donc pas a des choses si tristes!
MAURICE
--Mes bons amis, le peu d'affection que m'a temoigne mon frere, le
depart de maman et de papa, que je croyais ne jamais quitter dans l'etat
ou je suis, la crainte de mourir loin d'eux, sans les revoir, sans
recevoir leur benediction, sans les embrasser, tout cela me tue! Depuis
longtemps je me sens mourir, et je le cache a mes parents; je les
regrette amerement, et pourtant je suis heureux d'etre ici, parce que
je veux mourir bien pieusement, et vous m'y aiderez. Vous etes tous si
bons, si pieux! Chez moi, personne ne prie; personne ne parle du bon
Dieu; personne n'a l'air d'y penser, Monsieur de Nance, ajouta-t-il en
joignant les mains, ayez pitie de moi! Je voudrais faire ma premiere
communion comme l'a faite Francois, et je ne sais comment la faire; je
ne sais rien; je ne sais meme pas prier. Ayez pitie de moi! Dites, que
dois-je faire?
--Mon pauvre garcon, repondit M. de Nance attendri, il faut vous
soumettre a la volonte de Dieu; vivre s'il le veut, et ne pas vous
preoccuper de la crainte de mourir. Il faut vous soigner comme on vous
l'ordonne, offrir a Dieu les chagrins qu'il vous envoie, et lui demander
du courage et de la patience. Quant a la premiere communion, nous en
reparlerons demain. A present, restez bien tranquille jusqu'a l'arrivee
du medecin, que j'ai envoye chercher Isabelle ou Bathilde restera pres
de vous. Soyez calme, mon ami, et remettez-vous entre les mains du bon
Dieu, notre pere et notre ami a tous.
M. de Nance lui serra la main.
--Merci, monsieur, merci: vous m'avez deja console.
--M. de Nance sortit, emmenant Francois et Christine qui pleuraient et
qui envoyerent a Maurice un baiser d'adieu, auquel il repondit par un
sourire.
--Le croyez-vous bien malade, papa? dit Francois avec anxiete.
M. DE NANCE
--Je ne sais, mon ami; il est possible qu'il voie juste en se croyant
pres de sa fin; il est extremement change et affaibli depuis quelque
temps deja. Aujourd'hui
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