ractere effrayant de Celio m'inspirerait des craintes serieuses pour
mon bonheur, j'ai une dette sacree a payer.
--J'espere, lui dis-je, en souriant, que le sacrifice n'est pas trop
rude. En ce qui me concerne, il est nul, et votre supposition n'est
qu'une consolation gratuite dont je n'aurai pas la folie de faire mon
profit. En ce qui concerne Celio, je crois que vous etes plus forte que
lui, et que vous caresserez le jeune tigre d'une main calme et legere.
--Ce ne sera peut-etre pas toujours aussi facile que vous croyez,
repondit-elle; mais je n'ai pas peur, voila ce qui est certain. Il n'y
a rien de tel pour etre courageux que de se sentir dispose, comme je le
suis, a faire bon marche de son propre bonheur et de sa propre vie; mais
je ne veux pas me faire trop valoir. J'avoue que je suis secretement
enivree, et que ma bravoure est singulierement recompensee par l'amour
qui parle en moi. Aucun homme ne peut me sembler beau aupres de celui
qui est la vivante image de Lucrezia; aucun nom illustre et cher a
porter aupres de celui de Floriani.
--Ce nom est si beau en effet, qu'il me fait peur, repondis-je. Si
toutes celles qui le portent allaient refuser de le perdre!
--Que voulez-vous dire? je ne vous comprends pas.
Je lui fis alors l'aveu de ce qui s'etait passe entre Stella et moi, et
je lui demandai la main de sa fille adoptive. La joie de cette genereuse
femme fut immense; elle se jeta a mon cou et m'embrassa sur les deux
joues. Je la vis enfin ce jour-la telle qu'elle etait, expansive et
maternelle dans ses affections, autant qu'elle etait prudente et
mysterieuse avec les indifferents.
--Stella est un ange, me dit-elle, et le ciel vous a mille fois beni en
vous inspirant cette confiance subite en sa parole. Je la connais bien,
moi, et je sais que, de tous les enfants de Floriani, c'est celle qui a
vraiment herite de la plus precieuse vertu de sa mere, le devouement. Il
y a longtemps qu'elle est tourmentee du besoin d'aimer, et ce n'est pas
l'occasion qui lui a manque, croyez-le bien; mais cette ame romanesque
et delicate n'a pas subi l'entrainement des sens qui ferme parfois les
yeux aux jeunes filles. Elle avait un ideal, elle le cherchait et savait
l'attendre. Cela se voit bien a la fraicheur de ses joues et a la purete
de ses paupieres; elle l'a trouve enfin, celui qu'elle a reve! Charmante
Stella, exquise nature de femme, ton bonheur m'est encore plus cher que
le mien!
La Boccaferri prit encore ma
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