de la XXe dynastie.
De grandes teintes plates, uniformes, juxtaposees, mais non fondues: on
enluminait, on ne peignait pas au sens ou nous prenons le mot. De meme
qu'en dessinant, on resumait les lignes et on supprimait presque le
modele interne, en mettant la couleur, on la simplifiait et on ramenait
a une seule teinte, non rompue, toutes les varietes de tons qui existent
naturellement sur un objet ou qu'y produisent les jeux de l'ombre et de
la lumiere. Elle n'est jamais ni entierement vraie ni entierement
fausse. Elle se rapproche de la nature autant que possible, mais sans
pretendre a l'imiter fidelement, l'attenue tantot, tantot l'exagere et
substitue un ideal, une convention a la realite visible. L'eau est
toujours d'un bleu uni ou raye de zigzags noirs. Les reflets fauves et
bleuatres du vautour sont rendus par du rouge vif et du bleu franc. Tous
les hommes ont le nu brun, toutes les femmes l'ont jaune clair. On
enseignait dans les ateliers la couleur qui convenait a chaque etre ou a
chaque objet, et la recette, une fois composee, se transmettait sans
changement de generation en generation. De temps a autre quelques
peintres plus hardis que le commun se risquaient a rompre avec la
tradition. Vous trouverez des hommes au teint jaune comme celui des
femmes, a Saqqarah sous la Ve dynastie, a Ibsamboul sous la XIXe, et des
personnages aux chairs roses, dans les tombeaux de Thebes et d'Abydos,
vers l'epoque de Thoutmos IV et d'Harmhabi. Ces nouveautes ne duraient
guere, un siecle au plus, et l'ecole retombait dans ses anciens
errements. N'allez pas imaginer cependant que l'ensemble produit par ce
coloris factice soit criard ou discordant. Meme dans des ouvrages de
petite dimension, manuscrits du _Livre des Morts_, ornements des
cercueils ou des coffrets funeraires, il a de l'agrement et de la
douceur. Les tons les plus vifs y sont juxtaposes avec une hardiesse
extreme, mais avec la pleine connaissance des relations qui
s'etablissent entre eux et des phenomenes qui resultent necessairement
de ces relations. Ils ne se heurtent, ne s'exasperent, ni ne
s'eteignent; ils se font valoir naturellement et donnent naissance, par
le rapprochement, a des demi-tons qui les accordent. Passez du petit au
grand, du feuillet de papyrus ou du panneau en bois de sycomore a la
paroi des tombeaux et des temples, l'emploi habile des teintes plates,
loin d'y blesser l'oeil, le flatte et le caresse. Chaque mur est traite
comme un tout, et
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