le dernier fut debout, les republicains avaient deja
franchi a peu pres le tiers de la distance.
Ils marchaient, la baionnette en avant, sur trois rangs, chaque
rang ayant trois hommes d'epaisseur.
Roland marchait en tete du premier rang; le general Hatry entre le
premier et le second.
Ils etaient tous deux faciles a reconnaitre, etant les seuls qui
fussent a cheval.
Parmi les Chouans, Cadoudal etait le seul cavalier.
Branche-d'or avait mis pied a terre en prenant le commandement des
huit hommes qui devaient suivre Georges.
-- General, dit une voix, la priere est faite et tout le monde est
debout.
Cadoudal s'assura que la chose etait vraie.
Puis, d'une voix forte:
-- Allons! cria-t-il, egayez-vous, mes gars!
Cette permission, qui, pour les Chouans et les Vendeens,
equivalait a la charge battue ou sonnee, etait a peine donnee, que
les Chouans se repandirent dans la plaine aux cris de "Vive le
roi!" en agitant leur chapeau d'une main et leur fusil de l'autre.
Seulement, au lieu de rester serres comme les republicains, ils
s'eparpillerent en tirailleurs, prenant la forme d'un immense
croissant dont Georges et son cheval etaient le centre.
En un instant les republicains furent debordes, et la fusillade
commenca a petiller.
Presque tous les hommes de Cadoudal etaient des braconniers,
c'est-a-dire d'excellents tireurs armes de carabines anglaises
d'une portee double des fusils de munition.
Quoique ceux qui avaient tire les premiers coups eussent paru etre
hors de portee, quelques messagers de mort n'en penetrerent pas
moins dans les rangs des republicains, et trois ou quatre hommes
tomberent.
-- En avant! cria le general.
Les soldats continuerent de marcher a la baionnette.
Mais, en quelques secondes, ils n'eurent plus rien devant eux.
Les cent hommes de Cadoudal etaient devenus des tirailleurs, et
avaient disparu comme troupe.
Cinquante hommes s'etaient repandus sur chaque aile.
Le general Hatry ordonna face a droite et face a gauche.
Puis, on entendit retentir le commandement:
-- Feu!
Deux decharges s'accomplirent avec l'ensemble et la regularite
d'une troupe parfaitement exercee; mais elles furent presque sans
resultat, les republicains tirant sur des hommes isoles.
Il n'en etait point ainsi des Chouans qui tiraient sur une masse;
de leur part, chaque coup portait.
Roland vit le desavantage de la position.
Il regarda tout autour de lui, et, au milieu de la fumee,
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