ont
laides, monstrueuses et mechantes en comparaison de celles-ci?
--Je dirai tout ce que vous voudrez pour vous faire plaisir, repondit
Elsie desappointee, mais la verite est que je ne vois rien ou presque
rien de ce que vous me decrivez avec tant d'enthousiasme. J'apercois
bien autour de ces fleurs et de cette lampe, des vols de petits
papillons microscopiques, mais je distingue a peine des points
brillants et des points noirs, et je crains que vous ne puisiez dans
votre imagination les splendeurs dont il vous plait de les revetir.
--Elle ne voit pas! elle ne distingue pas! s'ecria douloureusement la
fee aux gros yeux. Pauvre petite! j'en etais sure! Je vous l'avais
bien dit, que votre infirmite vous priverait des joies que je savoure!
Heureusement, j'ai su compatir a la debilite de vos organes; voici un
instrument dont je ne me sers jamais, moi, et que j'ai emprunte pour
vous a vos parents. Prenez et regardez.
Elle offrait a Elsie une forte loupe, dont, faute d'habitude, Elsie
eut quelque peine a se servir. Enfin, elle reussit, apres une certaine
fatigue, a distinguer la reelle et surprenante beaute d'un de ces
petits etres; elle en fixa un autre et vit que miss Barbara ne l'avait
pas trompee: l'or, la pourpre, l'amethyste, le grenat, l'orange, les
perles et les roses se condensaient en ornements symetriques sur
les manteaux et les robes de ces imperceptibles personnages. Elsie
demandait naivement pourquoi tant de richesse et de beaute etaient
prodiguees a des etres qui vivent tout au plus quelques jours et qui
volent la nuit, a peine saisissables au regard de l'homme.
--Ah! voila! repondit en riant la fee aux gros yeux. Toujours la
meme question! Ma pauvre Elsie, les grandes personnes la font aussi,
c'est-a-dire qu'elles n'ont, pas plus que les enfants, l'idee saine
des lois de l'univers. Elles croient que tout a ete cree pour l'homme
et que ce qu'il ne voit pas ou ne comprend pas, ne devrait pas
exister. Mais moi, la fee aux gros yeux, comme on m'appelle, je sais
que ce qui est simplement beau est aussi important que ce que l'homme
utilise, et je me rejouis quand je contemple des choses ou des etres
merveilleux dont personne ne songe a tirer parti. Mes chers petits
papillons sont repandus par milliers de milliards sur la terre, ils
vivent modestement en famille sur une petite feuille, et personne n'a
encore eu l'idee de les tourmenter.
--Fort bien, dit Elsie, mais les oiseaux, les fauvettes, les
rossigno
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