rit, fertile en saillies,
ne menageait personne; mais ses bons mots etaient si plaisants
que, d'ordinaire, le rire qu'ils provoquaient disposait a
l'indulgence. Cependant il rencontra parfois sur son chemin des
gens qui accueillirent mal ses plaisanteries. Un jour meme, certain
seigneur se facha si fort contre Triboulet qu'il le menaca de
lui passer son epee a travers le corps. Le pauvre bouffon, tout
effraye, vint se plaindre au roi du mauvais traitement dont on le
menacait. "Que ton ennemi, s'ecria Francois I, ne s'avise[1] pas
de commettre une si sotte action, car je le fais pendre un quart
d'heure apres.--Merci, prince, repondit le bouffon; je n'attendais
pas moins de votre generosite. Mais voulez-vous mettre le comble
a votre bonte?--Que dois-je donc t'accorder encore?--Faites-le
pendre un quart d'heure avant."--CLAUDE AUGE.
[Footnote 1: Why subjunctive?]
Comment les rois se faisaient-ils divertir autrefois?--L'emploi de
bouffon etait-il important au moyen age?--Qui est-ce qui servait,
le plus souvent, d'amuseur officiel?--Comment etait-il habille?--A
quelle epoque Triboulet a-t-il vecu?--S'amusait-on de ses
plaisanteries?--Est-ce qu'il a fait prendre la mouche a ses victimes
quelquefois?--De quai l'a-t-on menace une fois?--Chez qui a-t-il
couru?--Celui-ci qu'a-t-il promis de faire?--Qu'est-ce que Triboulet
a demande encore?
Soyez pret a donner une definition des mots les plus difficiles.
146. LE PAYSAN ET LE PRINCE
Il etait une fois un prince puissant et opulent qui pour agrandir
le parc de son chateau, depouilla un pauvre paysan du seul morceau
de terre qu'il possedait. Un jour, comme il se promenait, triste
et preoccupe, dans le champ qu'il avait vole, il vit le paysan
qui s'approchait de lui, tenant a la main un sac vide. "Je viens
vous parler, prince, dit-il, les larmes aux yeux, de vouloir
bien accorder une grace a celui que vous avez vole; souffrez
qu'il emporte[1] de son patrimoine seulement autant de terre
que se sac peut contenir.--Je ne puis vous refuser l'objet de
cette sotte demande," repondit l'usurpateur.
Le paysan remplit alors de terre son sac: "J'ai encore une grace
a vous demander, dit-il ensuite a son fief interlocuteur, c'est de
m'aider a charger ce sac sur mon epaule." Le prince y consentit,
bien qu'impatiente et pret a entrer en colere; mais lorsqu'il
voulut soulever le sac plein, il s'ecria: "Je suis fou de vouloir
soulever ce sac, il est trop lourd; homme singulier, empor
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